Hello world...

Les geeks auront reconnu le titre de l’article-test d’un nouveau blog lors de la configuration d’un serveur. J’ai trouvé en fait que ce titre était particulièrement à propos, alors qu’avec ce ramassis de textes, de pensées et de réflexions, je souhaite présenter au monde (ben, aux 3-4 personnes ici mettons) une perspective différente.


Oui, Chérie et quelques amis/collègues sont bien au fait de mon côté plus que givré, mais c’est parce qu’ils peuvent difficilement échapper aux détails de notre dernière soirée, dernière rencontre, dernière expérience, dernière découverte... Pour le reste du monde, je suis un homme « parfaitement normal », dans toute la splendeur des stéréotypes masculins, cis-hétéro de la génération X. Non, je n’ai pas envie de parler de pick-up ou du retour des Expos autour d’un BBQ avec les voisins, mais je suis parfaitement capable de faire semblant que ça me tente !

 

Je suis plutôt anonyme, libertin discret pour ne pas dire secret, et mon intention ici est de vous offrir de me suivre dans mes réflexions, mes recherches, mes expériences dans l’exploration de la sexualité sous une forme ouverte, inclusive, et surtout positive.

 

Un coming out donc ? Probablement, oui. Mais si je suis intimement convaincu de tout le bien que notre exploration sexuelle nous a apporté, à Chérie et moi, je ne vous apprend rien en disant qu’il est plus facile de réfléchir dans l’intimité de ses pensées que d’en faire profiter un public plus large. Les stigmates sociaux associés au libertinage, au polyamour et à toutes les variations de la vie de couple « socialement acceptable » ont la vie dure, et le souffle brûlant du conservatisme, excuse politique à la haine et à l’intolérance, est plus violent que jamais. Considérez ces textes comme mon acte de résistance.

 

La société rivalise d’idées pour choquer les bien-pensants tout en s’assurant que nos plus grandes insécurités soient commercialement exploitées jusqu’au dernier dollar. Le  bien-être sexuel est enseveli sous le discours des « problématiques » de santé, les modes, le porno, bref tout ce qui bénéficie la société de consommation. Exit le plaisir, la découverte, le partage, l’accomplissement, la croissance. On parle de sexualité comme d’un sujet à la mode, alors que c’est un des piliers de l’humanité, un besoin vital, essentiel ne serait-ce que pour la pérennité de l’espèce. C’est également l’ingrédient primaire de toute structure, de toute interaction sociale, peu importe où l’on vit sur la planète. La sexualité nous définis, nous unis et certainement nous divise. Elle ne se consomme pas, elle se vit. Ou se subit.

 

J’ai défini ma pensée comme « féministo-masculine ». Invention nécessaire parce qu’il  m’est finalement apparu clair – tardivement certes, mais vieux motard que jamais – que toute observation faite sans lunette féministe est automatique faussée par le kaléidoscope du patriarcat: notre société est bâtie, dans ses moindres détails, aux dépends des femmes. Impossible donc de l’observer avec un soucis d’équité sans penchant féministe pour en corriger les déformations aberrantes.

Masculine parce que je suis un homme, cis, qui s’assume sans complexe et sans insécurité, idéalement avec autant de finesse qu’il m’est possible d’en invoquer. Et parce que je crois fermement que l’égalité des sexes, comme pour tous les combats d’inclusion sociale, ne tend pas à écraser l’autre partie, mais plutôt a se soustraire de son joug. Le rôle des hommes dans l’évolution positive et inclusive de notre société est indissociable de celui des femmes et pour y parvenir il faudra détruire, déboulonner – comme une statue de Lenine en 1989 – toute la psyché masculiniste, phalo et androcentrique. Je suis convaincu que détruire le rôle des hommes contemporains c’est le risque de créer un vide, vide qui va se combler avec tout ce qui a de plus laid et de toxique. Je soumet que c’est un phénomène qu’on observe dejà, sous la forme de ces crétins vocaux, si appeurés par leur fragile existence, qu’il leur semble nécessaire de se hisser sur le dos des femmes pour ne pas sombrer dans leur propre insignifiance.

 

Je pense que pour briser définitivement le cycle infernal des générations d’hommes incapables de gérer leur charge émotionnelle sans faire appel à l’une ou l’autre forme de violence passe par la création d’un nouveau rôle, de nouveaux repères. Le rôle des hommes dans la mise en équilibre de notre société passe par la refonte du modèle masculin, pas son élimination. Notre malheur commun, vous et moi, c’est que nos efforts d’aujourd’hui ne paieront dividendes que longtemps après que nos atomes aient rejoint ceux des étoiles.

 

Possible que le paragraphe précédent vous ait fait serrer les poings. Je suis parfaitement conscient de mon arrogance dans ce discours, de l’ironie de vouloir présenter une vision alternative de la sexualité par la lentille d’un homme blanc, d’âge mûr, cis-hétéro, privilégié parmi les privilégiés. Mais parce que j’ai le bonheur d’être entouré de gens lucides, réfléchis et communicatifs, je crois avoir acquis la lucidité de savoir que j’occupe une place dont le mérite n’est attribuable qu’à la loterie de la naissance. Je souhaite contribuer aux prochains chapitres de notre société parce que je le veux, mais aussi parce que je le peux. Parce que la meilleur chose que je puisse faire avec ce privilège que je n’ai pas demandé, ce n’est pas de me cacher par crainte qu’on me l’enlève, mais bien de l’exploiter au maximum de ses possibilités pour infiltrer, corrompre, provoquer, modifier le cours de la pensée monolithique.

 

Je suis un homme qui a arraché son droit au plaisir des griffes de la culpabilité victimisante de ces enfants qui ont vécu des choses d’une violence insensée. Le mouvement « me too » a levé le voile odieux de l’aveuglement volontaire de toute une société sur ce qu’on a toléré en silence pendant des générations. Grâce au vent de libération, ce sont des millions de personnes qui ont enfin déposé un poids immense, écrasant, qui pour beaucoup a modifié et défini à jamais le cours de leur vie. Dans une ironie du sort magnifique, ces hommes qu’on dénonçait pour leur violence animale étaient parfois eux-même façonnés par ces mêmes comportements subis plus jeunes. Dans ce mouvement, dans la tempête d’émotions vécues en prenant la juste mesure de la souffrance de ma sœur, mon ex, mon amie, ma collègue, j’ai pris conscience du cul-de-sac dans lequel je vivais: dans un rôle où émotions et faiblesse sont synonymes, on ne peut que se résoudre à être dévoré tranquillement par les démons nés de ces traumatismes.

 

J’avais 11 ans. Il en avait 17. Il s’est tué dix ans plus tard.

J’avais 13 ans. C’était un religieux. Un homme de confiance. En contact avec des centaines de garçons. Il est mort seul et dément.

 

Des fois que j’ai le goût de croire à la justice divine…

 

Il aura fallu une rencontre improbable avec une femme formidable, autrice d’un livre érotique magnifique, né de son propre combat et sa propre délivrance des violences subies plus jeunes, dans un café de Rosemont pour arracher d’un coup ce pansement qui refusait de me décoller de la peau. J’en reparlerai peut-être ici, ou pas, mais au moins vous aurez le contexte sur la sauvagerie de mes opinions sur la religion. Et sur l’importance de prendre le contrôle de sa propre sexualité.

 

Je suis finalement, et c’est de loin mon plus beau rôle, l’amoureux, l’amant et l’ami de Chérie, femme de ma vie, mère de nos enfants et soleil de mon univers. Chérie, par bonté et par amour, accepte de laisser un peu de place a ces autres femmes de tête qui alimentent et élèvent ma réflexion. Je suis aussi père d’une fille assumée et d’une autre moins certaine de ce qu’elle est. Un père douloureusement conscient des pièges tendus aux fillettes, aux jeunes filles, aux jeunes femmes et aux femmes et l’éventuel prix à payer pour s’accomplir à chacune de ces étapes de leur vie. Je suis un fils et un frère, impuissant devant les épreuves injustes imposées à ces femmes qui m’ont fabriqué, au propre comme au figuré. Je suis un esprit scientifique, furieux devant les dérives médicales et l’ignorance assumée de la science quand il est question du corps féminin. Ça aussi on va y revenir, à cette médecine qui ne s’intéresse qu’à la moitié de l’humanité.  

 

En dix mots comme en mille, je fais ce qu’il m’est possible de faire pour être un humain aimant et respectueux. Tout simplement.